Hervé Blaise FEUNKE/Msc est expert Financier/Finance domestique/Finance Climatique, Directeur Général Adjoint du Fonds Camerounais d’Epargne pour le Progrès SA Yaoundé Cameroun.
Le 11 juillet 2024, Marcel ONDELE, secrétaire général de la Commission bancaire de l’Afrique Centrale (COBAC) a écrit aux directeurs généraux des établissements de crédit, établissements de microfinance et établissements de paiement opérant sur le territoire camerounais, leur demandant de « sursoir » au processus de transfert des avoirs en déshérence au profit de la Caisse des dépôts et consignations du Cameroun, en attendant la clarification de certains points. Qu’est-ce qui peut expliquer cette sortie du SG de la COBAC alors que le processus avait déjà été lancé ?
Pour ma part, la demande du secrétaire général de la Commission bancaire de l’Afrique Centrale (COBAC), de suspendre le processus de transfert des avoirs en déshérence à la Caisse des dépôts et consignations du Cameroun (CDEC) peut s’expliquer par plusieurs facteurs potentiels :
1- Le besoin Clarification Réglementaire : La COBAC peut avoir identifié des ambiguïtés ou des lacunes dans la réglementation en vigueur concernant le transfert des avoirs en déshérence. Avant de continuer, il est crucial de s’assurer que toutes les dispositions légales et réglementaires sont claires et correctement interprétées pour éviter des problèmes juridiques futurs.
2-La Protection des Droits des Déposants : Il est possible que des préoccupations aient été soulevées quant à la protection des droits des déposants ou des ayants droit des avoirs en déshérence. La COBAC peut vouloir s’assurer que les procédures garantissent que les fonds soient gérés de manière transparente et que les ayants droit puissent récupérer leurs fonds sans entrave.
3-Le Problèmes Opérationnels : Le processus de transfert des avoirs en déshérence peut avoir rencontré des défis opérationnels ou des incohérences dans sa mise en œuvre par les établissements financiers. La suspension pourrait permettre de résoudre ces problèmes et d’assurer une mise en œuvre uniforme et efficace.
4-La Coordination entre Institutions : La CDEC et les établissements de crédit peuvent nécessiter une meilleure coordination pour gérer le transfert des avoirs. La COBAC peut vouloir clarifier les rôles et responsabilités de chaque partie prenante pour éviter des conflits ou des inefficacités.
5-La Vérification et les Audits : Avant de procéder au transfert, il peut être nécessaire de réaliser des audits supplémentaires ou des vérifications pour s’assurer que tous les avoirs en déshérence sont correctement identifiés et que les montants sont exacts.
6- Les Préoccupations du Secteur : Il est possible que les établissements financiers eux-mêmes aient exprimé des préoccupations ou des objections concernant le processus, poussant la COBAC à réévaluer la situation avant de continuer.
Il apparait donc pour mon point de vue que la sortie de la COBAC peut être vue comme une mesure de précaution visant à s’assurer que le processus de transfert des avoirs en déshérence soit effectué de manière transparente, efficace et en conformité avec la réglementation applicable.
Quel impact cette décision peut avoir dans le processus déjà enclenché ?
La décision du secrétaire général de la Commission bancaire de l’Afrique Centrale (COBAC), de suspendre le processus de transfert des avoirs en déshérence à la Caisse des dépôts et consignations du Cameroun (CDC) peut avoir plusieurs impacts sur le processus déjà enclenché :
1-Le Ralentissement des Opérations : La suspension du processus signifie que toutes les opérations liées au transfert des avoirs en déshérence seront mises en pause. Cela peut entraîner des retards dans la finalisation des transferts et affecter les plans des établissements financiers et de la CDEC.
2-L’Incertitude pour les Ayants Droits : Les déposants ou leurs ayants droits peuvent ressentir une incertitude accrue concernant la récupération de leurs fonds. Une suspension prolongée pourrait engendrer des inquiétudes quant à la disponibilité et à la sécurité des avoirs en déshérence.
3-La Réévaluation des Procédures : Les établissements financiers devront peut-être réévaluer et ajuster leurs procédures internes pour se conformer à toute nouvelle directive ou clarification émise par la COBAC après la suspension. Cela pourrait nécessiter des ressources supplémentaires et des ajustements organisationnels.
4-L’Augmentation des Coûts Administratifs : La suspension et l’éventuelle révision des processus peuvent entraîner des coûts administratifs supplémentaires pour les établissements financiers, qui devront peut-être investir dans la formation du personnel, des audits internes, ou des systèmes de gestion des avoirs.
5-La Nécessité de Communication : Les établissements financiers et la CDEC devront probablement intensifier leurs efforts de communication pour informer les clients et les ayants droit des raisons de la suspension et des mesures prises pour résoudre les problèmes. Une communication transparente et proactive sera essentielle pour maintenir la confiance.
6-l’adaptation Réglementaire : Si la COBAC décide de modifier ou de clarifier les réglementations après la suspension, les établissements financiers devront se conformer rapidement à ces nouvelles directives. Cela peut impliquer des changements dans les politiques internes et la documentation réglementaire.
7-l’impact sur la Planification Financière : La suspension du transfert des avoirs en déshérence peut également affecter la planification financière de la CDEC, qui aurait pu compter sur ces fonds pour divers projets ou initiatives.
En somme, bien que la suspension puisse causer des perturbations à court terme, elle vise à garantir que le processus de transfert soit effectué correctement et conformément à la réglementation, ce qui est essentiel pour la stabilité et la confiance à long terme dans le système financier.
Existe-t-il une règlementation communautaire en la matière en zone Afrique Centrale, si non pour quoi ?
En Afrique Centrale, la réglementation concernant les avoirs en déshérence est généralement guidée par les lois nationales de chaque pays membre de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), plutôt que par une réglementation communautaire spécifique.
Il n’existe pas de réglementation communautaire unique et spécifique au sein de la CEMAC pour la gestion des avoirs en déshérence. Quelques raisons possibles justifient cette absence :
-la Souveraineté Nationale : Les pays membres de la CEMAC peuvent préférer gérer les avoirs en déshérence selon leurs propres lois et réglementations nationales, en respectant leur souveraineté et les spécificités locales.
-La Complexité et la Diversité Juridique : La diversité des systèmes juridiques et des pratiques financières au sein des pays membres peut rendre difficile l’élaboration d’une réglementation communautaire uniforme qui soit applicable à tous.
-Les Priorités Réglementaires : La CEMAC et ses organes de régulation, comme la COBAC, peuvent avoir d’autres priorités régionales en termes de régulation financière, comme la supervision bancaire, la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, laissant les questions de gestion des avoirs en déshérence aux juridictions nationales.
-l’évolution Progressive : La création de réglementations communautaires peut être un processus long et complexe, nécessitant des consultations et des accords entre tous les États membres. Il est possible que des discussions sur ce sujet soient en cours mais qu’elles n’aient pas encore abouti à une réglementation spécifique.
Bien que l’absence de réglementation communautaire spécifique puisse sembler un obstacle, elle permet aussi aux pays de la CEMAC de gérer les avoirs en déshérence de manière adaptée à leurs contextes juridiques et économiques respectifs. Cependant, une harmonisation régionale pourrait être bénéfique à long terme pour assurer une gestion cohérente et transparente des avoirs en déshérence dans toute la région. La COBAC pourrait ainsi jouer un rôle crucial dans la coordination de telles initiatives harmonisatrices.
La CDEC se dit résolument engagée à poursuivre ses opérations, en conformité avec le décret du Premier ministre du 1er décembre 2023 fixant les modalités de transfert et de gestion de fonds et avoir. Cette décision de la CDEC ne va-t-elle pas venir envenimer une situation déjà suffisamment tendue ?
-Les Conflits d’Autorité car le choix de la CDEC pourrait être perçue comme un défi à l’autorité de la COBAC, ce qui pourrait créer des tensions institutionnelles entre la CDEC et la Commission bancaire. Cela pourrait compliquer la coopération et la coordination futures entre les deux entités.
-La Confusion pour les Établissements Financiers assujettis concerné par l’opération du fait que les établissements de crédit et de micro finance pourraient se retrouver dans une situation difficile, ne sachant pas s’ils doivent se conformer aux directives de la COBAC ou aux instructions de la CDEC. Cette confusion pourrait paralyser certaines opérations et entraîner des erreurs dans le processus de transfert des avoirs en déshérence.
-Le Risque Juridique car la poursuite des opérations par la CDEC malgré la suspension demandée par la COBAC pourrait exposer la CDEC à des risques juridiques, notamment si les établissements financiers décident de contester la légalité des transferts en cours. Cela pourrait entraîner des litiges qui pourraient être coûteux et longs à résoudre.
-La Perte de Confiance : La situation pourrait nuire à la confiance des déposants et des ayants droits dans la gestion des avoirs en déshérence. La perception d’une lutte de pouvoir ou d’une mauvaise gestion pourrait éroder la confiance du public dans les institutions financières et dans le système de régulation.
Quelle peut être selon vous la porte de sortie pour une meilleure Gestion de la Situation actuelle ?
La solution se trouve à plusieurs niveaux qu’il faut rapidement explorer afin de rassurer l’ensemble des parties à savoir :
-Le Dialogue et la Coordination : Il serait bénéfique que la COBAC et la CDEC engagent un dialogue pour résoudre les points de divergence. Une approche collaborative permettrait de clarifier les modalités du décret et de s’assurer que toutes les parties sont alignées sur les procédures à suivre.
-La Clarification Réglementaire : Il pourrait être utile de publier des directives claires et détaillées sur la manière dont le décret du Premier ministre doit être mis en œuvre, en tenant compte des préoccupations soulevées par la COBAC. Cela aiderait à réduire la confusion et à assurer une mise en œuvre harmonieuse.
-La Communication Transparente : je pense qu’informer les établissements financiers et le public des raisons de la suspension demandée par la COBAC et des mesures prises pour résoudre les problèmes est crucial. Une communication transparente peut aider à maintenir la confiance et à éviter des malentendus.
-La Révision des Procédures car si des lacunes ou des ambiguïtés existent dans le décret ou les procédures en place, il pourrait être nécessaire de les réviser pour s’assurer qu’elles sont complètes et pratiques. Une clarification juridique pourrait également être obtenue pour éviter des interprétations divergentes.
En conclusion la décision de la CDEC de poursuivre ses opérations pourrait en effet exacerber une situation déjà tendue. Une approche collaborative et transparente entre la COBAC et la CDEC, ainsi qu’une communication claire avec les établissements financiers et le public, sont essentielles pour résoudre les divergences et assurer une gestion efficace et légale des avoirs en déshérence.
Je suis Jean Daniel Obama, journaliste issu de la 16ème promotion de l’Institut Siantou Supérieur à Yaoundé. Passionné des questions agropastorales, j’ai décidé de me lancer et me spécialiser dans ce domaine où j’espère apporter l’information utile non seulement aux décideurs mais également aux entrepreneurs.
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